Alors que nous traversons le troisième trimestre de 2024, l’évolution des taux d’intérêt reste un enjeu central pour les entreprises, particulièrement dans notre secteur agroalimentaire. La Banque du Canada a récemment réduit son taux directeur pour la troisième fois cette année, le portant à 4,25 %, après un sommet à 5,00 % en début d’année. Cette série de baisses est perçue comme le début d’un cycle pluriannuel d’assouplissement monétaire, mais une question demeure : jusqu’où les taux peuvent-ils descendre, et quels seront les impacts sur nos entreprises?
Comprendre la baisse des taux
La Banque du Canada ajuste ses taux d'intérêt principalement pour stabiliser l'économie. Lorsqu'ils sont élevés, cela aide à contrôler l'inflation, mais cela rend également l'emprunt plus coûteux, ce qui freine la consommation et l'investissement. Maintenant que l'inflation est maîtrisée, l'objectif est de stimuler la croissance économique en facilitant l'accès au crédit pour les entreprises et les consommateurs.
Cependant, cette baisse des taux s’inscrit dans un contexte mondial différent de celui que nous avons connu au cours des dernières décennies. Par le passé, la mondialisation et l’expansion rapide du commerce international, notamment grâce à l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce, ont contribué à une baisse globale de l’inflation et des taux d’intérêt. Ce cadre a permis aux banques centrales de maintenir des taux historiquement bas. Aujourd’hui, les tensions géopolitiques et les politiques protectionnistes émergentes limitent ces dynamiques, ce qui pourrait maintenir les taux plus élevés qu’avant la pandémie.
Qu’en est-il du taux « neutre » ?
Un concept clé dans l'analyse des taux d'intérêt est celui du taux « neutre », soit le taux auquel l’économie n’est ni stimulée ni freinée. Les estimations varient, mais la Banque du Canada place ce taux entre 2,25 % et 3,25 %. Dans un scénario optimiste, le taux directeur pourrait descendre progressivement vers cette fourchette d’ici la fin de 2025, s'établissant probablement autour de 2,50 %.
Pour les entreprises du secteur agroalimentaire, cela signifie que si les taux d’emprunt continuent de baisser, nous pourrions bénéficier d’un environnement de financement plus favorable pour les investissements dans les infrastructures et l’innovation. Cependant, il est crucial de rester attentifs à l'évolution des conditions économiques globales, car les marges de manœuvre pour des baisses significatives des taux sont plus limitées qu'auparavant.
Les impacts pour nos entreprises
Cette baisse des taux d'intérêt représente à la fois une opportunité et un défi. D’un côté, la réduction des coûts d'emprunt permettra aux entreprises d'accéder plus facilement à du capital pour financer leurs projets de modernisation ou d'expansion. De l’autre, il est clair que la consommation des ménages reste fragile, avec des signes de faiblesse, notamment une faible croissance des dépenses de consommation.
De plus, la courbe de rendement, un indicateur qui détermine les taux d'intérêt à long terme, reste inversée, ce qui signifie que les rendements des obligations à court terme sont actuellement plus élevés que ceux des obligations à long terme. Cette inversion reflète une incertitude quant aux perspectives économiques futures et montre que, bien que les taux d’emprunt à court terme puissent baisser, ceux à long terme pourraient rester plus élevés.
Impact potentiel de l'élection américaine sur l'économie canadienne
Les deux candidats, Donald Trump et Kamala Harris, présentent des approches interventionnistes sur l’économie américaine. Trump propose des baisses d’impôts massives et un protectionnisme accru, notamment avec des tarifs douaniers élevés sur les importations, y compris celles provenant du Canada. Harris, tout en rejetant certaines de ces politiques, prévoit aussi des interventions économiques importantes, notamment dans le logement et la fiscalité. Ces politiques pourraient avoir des répercussions directes sur les relations commerciales canado-américaines.
Pendant que nous observons une baisse des taux d’intérêt et une reprise économique fragile, il est important de garder un œil sur les développements politiques internationaux, notamment l'élection présidentielle américaine. Les décisions économiques prises aux États-Unis peuvent influencer directement l'économie canadienne. Par exemple, si la Réserve fédérale américaine poursuit également une politique d’assouplissement monétaire après l’élection, cela pourrait contribuer à maintenir une certaine stabilité pour le dollar canadien.
Ainsi, les entreprises doivent suivre de près non seulement les décisions de la Banque du Canada, mais aussi les évolutions politiques et économiques chez nos voisins du sud. Le contexte post-électoral pourrait avoir des répercussions importantes sur les taux de change, les échanges commerciaux et la politique monétaire mondiale, influençant les coûts d’importation et d’exportation pour nos entreprises.
Alors que nous continuons à naviguer dans cette période de transformations économiques, il est crucial de rester vigilants face aux opportunités et risques qui accompagnent la baisse des taux d'intérêt. Bien que cette réduction puisse soulager les entreprises en termes de coûts d'emprunt, l’incertitude demeure quant à la vigueur de la consommation et à l’évolution des conditions économiques mondiales, particulièrement dans un contexte d’inflation maîtrisée mais de faible croissance. Le climat géopolitique, y compris l'issue des élections américaines, ajoute une couche supplémentaire de complexité, demandant une adaptation stratégique continue pour assurer la résilience des entreprises.
Sylvie